Très chère Paulette,
Tu es arrivée au gouvernement avec un sourire radieux, un enthousiasme fou, une volonté d’agir. Jamais tu n’as ressemblé à un politique qui pense carrière. Tu aurais voulu être élue d’une ville pour agir tous les jours et tu es devenue membre d’un gouvernement conduit par un homme qui incarnait l’éthique, et tu as pensé, comme beaucoup d’entre nous, que c’était un immense privilège, un cadeau.
Notre rencontre fut tout de suite d’amitié, je connaissais familialement la psychiatrie, cela m’aidait beaucoup, tu venais de ce milieu médical pas comme les autres qui doit respecter et comprendre un individu quel qu’il soit, quoiqu’il ait pu faire, parce que la vie humaine est toujours précieuse. C’est cela que tu nous apportais, un rappel constant à la vie, un rappel constant au souci des autres, ceux qui ne vont pas bien.
Avec Martine Aubry vous avez partagé ce souci et créé l’Apa, même si, comme surtout les femmes du gouvernement, nous aurions voulu que les gros héritages soient appelés au financement parce que les héritiers privilégiés n’ont pas à être encore plus chanceux que les autres. Mais la peur du refus de l’aide a été gagnante. Quelle belle avancée. Tu as continué à agir à l’assemblée jusqu’à ce que la maladie t’affaiblisse, maladie dont tu ne parlais que peu, juste pour regretter d’imposer cela à aux autres, à Denis surtout qui t’avait fait rire de bonheur quand tu parlais de votre décision d’être « à deux » pour tout.
Rares sont les portraits de journalistes qui emportent une totale adhésion, j’ai gardé en mémoire celui de Libé « Paulette Merveille » que j’avais applaudi un matin en me disant qu’un tel portrait ne pouvait être généré que par une femme politique hors normes. Nos derniers échanges ont encore été riches, tu ne voulais pas de réconfort pour une malade mais des échanges sur la vie politique et les obstacles au progrès trop librement dressés. Puis tu es partie en laissant des messages, ces Haïkus arrivés dans la boîte aux lettres comme un signe, ne pas perdre de temps, tout regarder, rendre précieuses ces images de fleurs, de vie, de chaleur et de froid, sans amertume et sans vengeance, en hommage peut être à la vie qui elle aussi se fane.
Merci.