Avant de venir à notre amie Paulette, je pense qu’il convient de faire un petit rappel sommaire de notre aventure…
Dans l’année 2015, l’actualité terrible en provenance d’Irak relatait les exactions contre les chrétiens d’Orient. Sensibilisé à cette détresse humaine, nous avons décidé avec quelques connaissances de créer l’Association Accueil et Solidarité des Hauts du Doubs. Elle a vu le jour en Mairie de Mouthe le 15 octobre 2015 avec le soutien des élus de la CCHD (maintenant SIVOM).
Les bases de l’Association ont été mises en place ce même jour avec la constitution du bureau. Parmi les membres actifs et plein de bonne volonté je dois citer en premier lieu Denis Pagnier lequel a été nommé Trésorier. Je savais que je pouvais compter sur quelqu’un de très fiable.
Le 7 août 2016, après bien des péripéties administratives, enfin nous avons accueilli à l’aéroport de Lyon une famille irakienne composée de 10 personnes dont deux personnes âgées et 3 petits enfants. Transportée à Mouthe, elle a intégré un appartement dans l’ancien Peloton de surveillance et d’intervention de la Gendarmerie propriété du SIVOM.
Comment vais-je vous parler de Paulette maintenant ?
C’est un exercice bien compliqué. Je ne suis sans doute pas très bon pour rédiger ce type de papier. Mais, j’ai tellement de respect pour elle que je ne peux pas refuser même si c’est compliqué pour moi. Déjà, il faut remettre notre première rencontre dans son contexte. Moi, l’ancien major de gendarmerie, toujours très respectueux des institutions je savais où résidait Paulette et avec qui. Mais pour moi, c’était la Secrétaire d’Etat, donc une personne « intouchable ».
Je n’ignorais pas la grave maladie qui la martyrisait. Lorsque Denis, chez lui, m’a présenté pour la première fois Paulette, j’étais sur la défensive et un peu impressionné de me retrouver face à elle. Immédiatement, alors que nous ne nous connaissions pas, la glace a été rompue. Pas de chichi ni de formalité avec Paulette laquelle m’a mis à l’aise de suite devant un café et des gâteaux. Curieuse de notre engagement, très à l’écoute, j’ai compris qu’elle appréciait particulièrement notre geste pour ces pauvres Irakiens (bien qu’elle en connaissait déjà tous les détails par Denis). Les échanges ont de suite été cordiaux, constructifs et efficaces. Dans l’Association, j’utilise énormément Denis qui se donne sans compter. Paulette spontanément a insisté pour nous aider dans le parcours administratif qui nous attendait. Cette aide providentielle nous a ouvert de nombreuses portes. Je n’ose penser aux nombres de téléphones qui ont dû être passés par eux deux.
Pour nous, les difficultés ont démarré avant même d’avoir pu accueillir ces deux familles. En effet, rappelez-vous la période, c’était au moment où la France était attaquée successivement par des attentats d’une violence inouïe. La liste des morts innocents devenait longue, trop longue. Le Gouvernement, devant ces actes de guerre a suspendu du jour au lendemain tout mouvement migratoire. Paulette dans ces moments de doute nous a conseillés et orientés et soutenus. La situation était compliquée. Nous avions obtenu un bel appartement par la collectivité mais, nous n’avions personne à y mettre. C’était frustrant et surtout les mois s’égrenaient…
Matériellement tout était en place mais, pas de migrant !!! Certains élus commençaient à me mettre la pression. Dans ces moments de difficultés, Paulette rompu à bien plus de pression lorsqu’elle exerçait ses plus hautes fonctions savait dédramatiser et nous rassurer. Elle avait pleine confiance dans notre engagement. Mais elle aussi s’est engagée dans cette aventure et pas qu’un peu. A chaque difficulté ou complications administratives, par l’intermédiaire de Denis, une solution émergeait et se concrétisait. Je ne vais pas énumérer ce qu’elle a fait. C’est juste considérable, sans elle cette aventure aurait existée mais avec quelles difficultés pour nous ! Elle a su nous ouvrir des portes infranchissables, sans doute que je ne l’ai pas assez remerciée pour cela. Son efficacité, son empathie et son humanisme ont été remarquables.
J’ai pu apprécier sa grande compassion vis-à-vis de notre famille Irakienne. Elle accueillait chez elle non seulement nos réunions mais aussi nos amis Irakiens. Je voyais qu’elle avait plaisir à les recevoir, à les questionner, à les encourager dans leur nouvelle vie. On ressentait chez elle l’amour des gens et, je crois que ce que nous avons fait pour ces étrangers la touchait au plus profond d’elle. Paulette aimait les gens, c’est indéniable. Sa grande gentillesse, sa simplicité, son origine modeste fait qu’on se trouvait de suite à l’aise à ses côtés. Nos amis Irakiens l’appréciaient particulièrement mais moi aussi.
Je lui serai à jamais redevable pour son engagement.
Nous avons perdu une très belle personne.